Dans le domaine fiscal, il est essentiel de connaître non seulement nos obligations, mais aussi nos droits dans toute procédure administrative. Récemment, le Tribunal Suprême espagnol a établi une doctrine qui affecte de manière significative l’inspection des appareils électroniques, même en dehors du domicile protégé, comme celui de l’entreprise. Notre responsable des litiges, Alaia Asensio Romero, analyse cet article en détail pour El Jurista.
L’article 18 de la Constitution espagnole dispose que « le domicile est inviolable. On ne pourra y entrer ou le perquisitionner sans le consentement de celui qui y habite ou sans une décision judiciaire, hormis en cas de flagrant délit ».
Ainsi, d’après cette disposition, bien que le domicile soit inviolable, il existe certains cas dans lesquels un tiers peut y accéder, et ce tiers peut être l’inspecteur des impôts. La législation fiscale le prévoit, bien qu’avec une règlementation incomplète et peu détaillée, et les tribunaux définissent depuis des années comment doivent êtres réalisées les perquisitions par l’administration et les exigences auxquelles doivent répondre les décisions de justice autorisant cet accès.
Dans ce contexte, le Tribunal Suprême espagnol est allé plus loin en établissant une doctrine qui a un impact significatif dans ce domaine, en limitant un aspect qui jusqu’à présent n’était pas réglementé : l’inspection des ordinateurs, des téléphones portables, des tablettes, des clés USB, etc., qui se trouvent en dehors du domicile protégé, en l’occurrence celui de l’entreprise.
Il s’agit du récent arrêt 3978/2023, du 29 septembre (recours de cassation n° 4542/2021), dans laquelle s’établit comme doctrine que, lors d’une inspection, les impôts ne peuvent pas examiner des documents sur des appareils électroniques, sauf dans certaines situations et toujours sous une stricte supervision judiciaire. Tout cela repose sur la reconnaissance de droits fondamentaux qui doivent être respectés lors de l’examen d’un téléphone portable ou d’un ordinateur, qu’il se trouve ou non au siège de l’entreprise.
En d’autres termes, l’inspection doit faire l’objet d’une autorisation judiciaire correspondante et, en outre, être fondée sur les principes de nécessité, de proportionnalité et d’adéquation de la mesure, en tenant compte des droits fondamentaux.
La nouveauté et l’originalité de cette affaire résident dans le fait que la copie de données a été demandée lors d’un contrôle effectué en dehors de l’entreprise, alors que le contribuable se trouvait au bureau des impôts, lors d’une comparution dans le cadre d’une procédure de contrôle, lorsqu’il a été prié d’autoriser l’unité d’audit informatique à faire une copie de l’ordinateur qu’il utilisait à l’époque pour répondre aux questions des inspecteurs.
L’entreprise n’ayant pas consenti à une telle demande et le délai de l’inspection arrivant à échéance, les inspecteurs des impôts ont adopté comme mesure de précaution la copie complète des informations de l’ordinateur sur un disque dur, sans même discriminer dans son contenu ce qui avait une incidence fiscale, et l’ont mis sous scellé pour l’ouvrir ultérieurement après avoir obtenu une autorisation judiciaire ; autorisation qui a été obtenue par le tribunal administratif n° 5 de Murcie et, par la suite, avalisée par le TSJ, pour être finalement annulée par le Tribunal Suprême espagnol.
L’arrêt du Tribunal Suprême espagnol conclut à la nullité de plein droit de l’action menée par l’administration dans ce cas, car « l’accès intégral et indiscriminé à des données personnelles sur un ordinateur de cette nature, accordé avant toute autorisation judiciaire, viole les droits constitutionnels concernés, tels que l’intimité personnelle et familiale, le secret des communications et la protection des données à caractère personnel ». Les juges considèrent que, avec la simple copie de masse à l’insu du juge, le droit fondamental en question traité dans chaque cas peut être considéré comme violé, en fonction de la nature des données et de l’implication effective de certains d’entre eux.
« En tout état de cause, le respect des droits fondamentaux (avec le plus haut niveau de protection constitutionnelle) prime sur l’exercice des pouvoirs administratifs, surtout en l’absence d’une réglementation légale complète, directe et détaillée ». « De plus, dans les actions administratives et judiciaires, il n’y a pas la moindre trace du manque de collaboration à l’inspection qui est imputé à la personne contrôlée, qui n’est pas spécifié, en dehors de ce reproche générique, ni indiqué en quoi il aurait consisté, puisqu’il n’est pas spécifié en détail quelle information spécifique, quel document ou quelle donnée nécessaire à des fins fiscales ont été demandés à l’intéressé et n’ont pas été pris en charge ou l’ont été de manière tardive ou incomplète ; il n’y a pas non plus de trace qu’il ait été sanctionné pour cette raison (art. 203 LGT) ».
Ainsi, le Tribunal Suprême espagnol a annulé un arrêt de la Chambre du contentieux administratif du Tribunal Supérieur de Justice de la région de Murcie et la décision d’autorisation d’entrée émise par le Tribunal de cette capitale. Dans ces derniers, l’accès à l’ordinateur du requérant était autorisé sur la base du régime prévu pour l’autorisation d’entrer dans un domicile, en supposant qu’un ordinateur est un lieu comparable à un domicile.
Aujourd’hui, les limites ont été clairement posées par le Tribunal Suprême espagnol par cet arrêt, de telle sorte qu’il rappelle que les appareils électroniques sur lesquels nous stockons aujourd’hui toutes les informations sont également soumis aux droits fondamentaux, même s’ils ne se trouvent pas à l’intérieur du domicile.
Pour toutes ces raisons, il est important de souligner que la collaboration dans les actions d’inspection est essentielle et que toute demande d’information doit être traitée de manière opportune et complète, à condition qu’elle soit légalement applicable et en tenant compte du fait que les droits fondamentaux sont au-dessus de l’exercice des pouvoirs administratifs, en particulier en l’absence d’une réglementation légale complète, directe et détaillée.
Alaia Asensio Romero, gestionnaire des litiges
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